La véritable histoire de Ah Q – Lu Xun

Revoilà Lu Xun ! J’avais déjà parlé de cet auteur avec sa nouvelle Le journal d’un fou et le revoici avec La véritable histoire de Ah Q. Écrit à l’origine en 1922, ce roman est l’une des œuvres principales qui critique la révolution du parti nationaliste chinois (le guomindang) en 1911.

Le héros (enfin, anti-héros pour être plus juste) est évidemment Ah Q. (prononcer Ah comme « A boire tabarnak ! » et Q comme la lettre en anglais ^^). Ah Q est un peu un paria de la société : journalier, sans domicile, sans famille, il a la particularité d’avoir un énorme pouvoir d’autosuggestion. Ses défaites sont souvent transformées en victoires par la puissance de son esprit ! ^^ En bref, ça tient un peu de la mythomanie : il façonne ses souvenirs pour que ça convienne à son égo. ^^ On voit paraitre une première critique de la révolution nationaliste avec ce trait de caractère de Ah Q : la révolution s’est soldée par une victoire selon les nationalistes, mais Lu Xun a pas mal de critiques à émettre envers cette révolution.

Petit point historique (voix de narrateur monocorde enclenchée) : La dernière dynastie impériale chinoise, la dynastie Qing n’était pas chinoise ! Mais Mandchoue ! Les mandchous, afin d’exercer leurs domination ont mis en place un très grand nombre de réformes humiliantes pour les chinois Han (ethnie majoritaire de Chine). Parmi ces réformes : celle qui obligeait les hommes à se raser la tête, excepté la longue natte à l’arrière du crâne, qu’on voit souvent dans la représentation du chinois au XXème siècle. Fin du point histoire (et de la voix de narrateur soporifique) ! Il apparait premièrement que les révolutionnaires eux-mêmes ne savaient pas toujours pour quoi ils se battaient : les révolutionnaires pouvaient non seulement intégrer n’importe qui dans leurs rangs, mais en plus, certains pensaient se battre pour la réhabilitation de la dynastie précédente, celle des Ming (l’arnaque !). Ensuite, le simple fait de se couper la natte imposée par la dynastie Mandchoue était considéré comme un acte révolutionnaire, et certains, comme Ah Q dans le roman, pouvaient être vus différemment, juste en se coupant les cheveux ! Trop bien ta coupe de veuch’ ! T’es révolutionnaire ?

Dernière critique de la révolution dans ce roman : le fameux « ok, mais qu’est-ce que ça a changé ? » Dans La véritable histoire de Ah Q, tout se déroule depuis un petit village, celui de Weichang, et on assiste à la révolution de trèèèèèès loin : des révolutionnaires passent en vitesse, on entend parler d’une révolution, puis un jour, c’est fini, et la vie du village reprend comme si de rien n’était, les puissants toujours puissants, les plus démunis, toujours aussi démunis. Avec sa critique de la révolution de 1911, Lu Xun s’est fait un très grand fan : Mao Zedong. Mao a longtemps été en guerre contre le Guomindang, et a fini par gagner cette guerre, suite à la révolution de 1949, qui a mis Mao et le parti communiste au pouvoir en Chine.

Ce récit est vraiment un classique en Chine, Lu Xun étant un auteur très important de la chine du XXème siècle, et il est à ce titre très intéressant à étudier. Le ton de Lu Xun étant souvent très ironique, il y a quand même moyen de s’amuser de son personnage et des situations qu’il décrit. Une très bonne lecture pour ma part !