Fleur de Neige – Lisa See

En 2018, je découvrais Lisa See, avec Fleur de Neige, un roman très complet qui aborde de nombreuses thématiques liées aux femmes en Chine ancienne. La découverte de ce roman est vraiment une bonne surprise pour moi. Alors allons-y gaiement ! ^^

Ce roman parle majoritairement de la relation qu’il pouvait y avoir entre deux Laotong, leur communication par le biais du Nüshu et un peu de la pratique du bandage des pieds. (Ne vous en faites pas, je vais expliquer ce que c’est que tous ces mots barbares ^^ ).

Tout d’abord, qu’est-ce que le Nüshu ? Le Nüshu (女书) était un système d’écriture de la langue chinoise utilisé dans le Jiangyong entre le XVème siècle et 2004. (Vous me suivez ? ^^) A la différence de l’écriture du chinois classique, ce système de transcription avait une particularité : il était appris et utilisé uniquement par les femmes, et jamais aucun homme n’a eu la possibilité d’apprendre cette langue. Le nüshu servait à transcrire non pas le mandarin moderne tel qu’on le connait, mais un dialecte de la région du Jiangyong : le Tuhua. C’était une graphie syllabique qui a ensuite inspiré les Hiragana, un des systèmes d’écritures Japonais (Et oui, il n’y a pas que les kanjis que les japonais ont piqués aux chinois. ^^). La dernière femme sachant écrire le nüshu, Yang Huanyi, est décédée en 2004, et avec elle l’usage de cet écrit à disparu.

Exemple de Nüshu qu’on trouve dans le livre.

Ensuite, les Laotong ? La relation de laotong (老同) représente l’union entre deux femmes en Chine ancienne. Cette pratique, présente surtout dans la région du Hunan, permettait de lier deux familles par une relation forte, équivalente au mariage mais entre deux femmes, les femmes étaient alors considérées comme sœurs. Cette union était utilisée lorsque deux familles souhaitaient unir leurs enfants par un mariage arrangé avant la naissance des deux enfants, et qu’il se trouvait que les deux enfants étaient de sexe féminin, ou alors, par le biais d’entremetteurs, pareillement à un « mariage arrangé », puis soudé par un contrat légal.

Enfin, je pense que tout le monde visualise un peu ce que sont les pieds bandés, mais un petit rappel ne fait pas de mal (en tout cas, pas à nous… ^^’ ). La pratique de bander les pieds des femmes fût mise en place dans le courant du Xème siècle, et perdurera jusqu’au début du XXème siècle. C’était une pratique qui était imposée aux femmes des classes les plus aisées au départ, mais qui s’est répandue à toutes les classes sociales de l’ethnie Han (plus de 90% de la population chinoise), à l’exception des plus pauvres. C’était censé rendre leur démarche plus fragile et provoquer un sentiment de protection chez l’homme. Le bandage des pieds commençait très tôt. Dès l’âge de 5 ou 6 ans, les os du pied étaient assouplis dans de l’eau chaude, du sang animal ou du vinaigre, afin de pouvoir plier les orteils sous le pied afin de réduire la taille du pied. Cette opération était évidemment (très) douloureuse, et certaines filles décédaient suite à cette pratique et aux infections qui s’ensuivaient. Lors de l’arrivée au pouvoir de la république de Chine, en 1912, cette pratique fût interdite, bien que certains parents, plus traditionalistes que la moyenne, continuaient à bander les pieds de leurs filles. (Joyeusetés du patriarcat)

Bon, maintenant que la partie reloue avec tous les points techniques est terminée, qu’en est-il du livre ? ^^ Outre son caractère hautement instructif, on assiste à une belle histoire entre Fleur de Lys, le personnage principal, et Fleur de Neige, sa Laotong. Afin de communiquer au nez et à la barbe de tous, ces deux femmes se font passer un éventail avec des messages écrits en Nüshu dessus. Le titre de la VO (anglaise) est d’ailleurs Snow Flower and the Secret Fan. C’est un objet scénaristique important que cet éventail, qui n’apparait plus dans le titre en VF, mais en même temps, Fleur de neige et l’éventail secret, ça aurait peut-être moins marché. ^^

Et je viens de voir qu’il en existe un film (que je n’ai pas vu du coup), j’en parlerais peut-être à l’occasion (quand je le verrai quoi. ^^)

En attendant, vous pouvez vous plonger dans le livre, qui m’a vraiment captivé pour le coup, et c’est assez rare venant d’un livre duquel je n’attendais pas grand-chose. ^^